lundi 1 novembre 2010

Menottes

La littérature est remplie d'écrits sur les mains, mais il faut pourtant que j'y aille de mon récit... à deux mains, peut-être  
 
Les mains disent beaucoup de choses sur un homme, le meilleur comme le pire.
"Soixante dix euros, vous n'y allez pas de main morte!!"
Elle n'avait pas compris mon jeu de mots et rosit en cherchant désespérément une réponse.
Cette jeune manucure balbutiante me donnait une irrésistible envie d'enfoncer le clou.
"Non seulement je vous abandonne mes rognures d'ongle et mes squames et en plus vous me saignez aux quatre veines!"
Les joues cramoisies contrastaient tellement avec les yeux d'un bleu profond que j'enfonçai le clou plus avant.
"J'ai bien envie de vous flanquer..." je la sentais au bord de l'évanouissement et ça me plaisait.
"... vous flanquer un pourboire". Pourquoi avais-je dit ça alors qu'elle chancelait comme je l'avais désiré? Je lui avais confié mes doigts une heure durant et cette idée d'une offrande de la main à la main me venait subitement. Comme elle reprenait ses esprits je pris sa main dans les miennes pour y glisser dix euros. "Etes-vous libre ce soir?"

"Messieurs les jurés, ne vous laissez pas abuser par ce port noble, ce visage avenant et ces mains délicates... ces mains qui ont commis l'irréparable et c'est pourquoi vous me suivrez dans une sentence exemplaire: vingt ans de réclusion!"
"Vingt ans! vous n'y allez pas de main morte!!" C'était plus fort que moi mais au moins je venais d'avoir la satisfaction de dérider le seul juré qui ne somnolait pas.
Cette petite conne n'avait pas été à la hauteur, elle m'avait tellement déçu. Elle n'avait pas aimé mes menottes tout comme je haïssais les miennes, et puis elle avait le cou trop blanc.
J'aurais imaginé que les bracelets métalliques seraient plus seyants à mes poignets mais il n'en était rien. Tout allait mal aujourd'hui, alors j'ai croisé les doigts.



 
 
Publié aux Impromptus Littéraires

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