lundi 23 février 2015

Le kiosque à zizique

Raconter aux Impromptus Littéraires le jardin, le parc, le square , le paysage de son enfance en empruntant le style à son auteur préféré, mais sans le désigner: c'est mon secret et comme tous les secrets, je ne le répéterai qu'à une seule personne à la fois :)


Le kiosque à zizique Place Wilson



Les dimanches d'été on allait au joli kiosque à musique de la place Wilson à Dijon.
Parait qu'on le doit à l'architecte Desherault depuis 1912!
Moi je dis: Devoir encore quelque chose pour un machin style art-nouveau de 1912, c'est se foutre de la gueule du contribuable!
J'appelle pas ça de l'impôt, j'appelle ça de l'attaque à main armée!
Parait qu'le tourniquet à flonflons avait été inauguré en grandes pompes - en rangers - et en avril 1912 par la musique militaire du 27ème régiment d'infanterie... mais à l'époque j'étais encore dans les valseuses à mon dab et j'risquais pas d'entendre sonner l'trompion.

Donc le dimanche on jouait à chat perché entre les chiards et les bonnes, vu qu'y avait personne d'autre.
A l'époque quand on n'avait pas de bonne pour garder ses chiards, eh bien, on n'en faisait pas.
On jouait à vérifier qu'un machin octogonal a bien huit côtés mais je m'est souvent gouré.

A l'heure où les vieux cons allaient crâmer leurs éconocroques à Deauville et les putes en gagner à Saint-Tropez, nous autres on courait autour du kiosque à musique.
Enfin musique, c'est un bien grand mot! Le gonze était pas assez riche pour s'offrir un piano alors y jouait du branle poumons, du boutonneux, enfin d'l'accordéon... une sorte d'adagio... probablement de Mozart... quand c'est très beau et qu'on n'est pas bien sûr, c'est presque toujours Mozart.

Y'avait même des caves qui guinchaient. Guincher sur du Mozart, c'est nul!!
Moi j'avais pas l'âge et pis la danse c'est du pelotage. Tout ce qu'on fait avec les pieds c'est parfaitement secondaire. Tout le monde s'en fout.
Pourtant elle était belle ma môme: huit ans et tout c'qu'y faut là où y faut mais en miniature; un vrai p'tit conte de fée, blonde comme les blés, balancée comme Martine Carol, claire comme le jour, avec des yeux de myosotis, et un teint, une bouche… Non, mais alors une bouche ! C’était trop pour un seul homme.
D'ailleurs c'est c'que m'a fait comprendre un gonze rouleur de mécaniques.
Rouler des mécaniques c'est une maladie des hommes... et lui était très malade!
Quand les gonzes de 50 kilos disent certaines choses, ceux de 35 kilos les écoutent.
Y voulait me montrer qui c'était Raoul et j'ai aussitôt compris que c'était lui.
Comme disait mon pépé, j'ai battu en retraite.
La retraite, faut la prendre jeune. Faut surtout la prendre vivant. C'est pas dans les moyens de tout le monde.
Y a des circonstances où y vaut mieux s'en aller la tête basse que les pieds devant, alors vu les circonstances je suis retourné dans les jupes de la bonne... c'était pas la plus mauvaise place.
Elle était peut-être folle de la messe mais pas l'contraire, nom de Dieu!
Et puis dans la vie, il faut toujours être gentil avec les femmes, même avec la bonne; c'est ce que mon dab disait aussi.
Par contre j'ai jamais revu ma môme, mon conte de fée. Je l'avais courtisée, séduite... je l'aurais peut-être enlevée et en cas d'urgence épousée?
Finalement j'aurais pris perpette.
Je préfère m'en souvenir comme ça... on vieillit mieux.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire